Le décret n° 2022-705 du 26 avril 2022 porte le taux de cotisation qui incombe aux personnels détachés directs à l’étranger de 11,10% à 27,77% du traitement indiciaire. Cette mesure s’applique aux détachements ou aux renouvellements de détachement prononcés à compter du 1er mai 2022.
Une réunion a été organisée le 23 mai à l’initiative de la Direction de la culture, de l’enseignement, de la recherche et du réseau (DCERR) au Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères à laquelle participaient l’ensemble des acteurs de l’Enseignement français de l’étranger siégeant au Conseil d’Administration de l’AEFE : Ministère des Affaires Étrangères, Directeur de l’AEFE, Ministère de l’Education Nationale, Directeur général de la MLF, parlementaires (député-es, sénateur-trices), représentants des Français de l’étranger, représentant-es des associations de parents d’élèves, représentant-es des personnels. Avaient aussi été convié-es les représentant-es des opérateurs privés (AFLEC, Odyssey).
Ci-dessous la transcription de l’intervention faite par la FSU, puis notre compte rendu de la réunion.
Intervention de la FSU
Actuellement la part patronale de la pension civile des personnels détachés directs n’est pas payée en France par les employeurs de droit étranger alors que l’AEFE s’en acquitte pour ses personnels détachés ce qui pèse lourdement sur le budget de l’opérateur public. La FSU dénonce à la fois cette inégalité et l’insuffisance structurelle de la compensation accordée à l’opérateur public.
L’arrêt de la Cour de justice de l’UE du 6 octobre 2016 ne concerne pas les détachés à l’étranger mais ceux détachés au sein d’une institution ou d’un organe de l’UE. Il ne peut donc être invoqué. L’écrêtement de la pension française a été jugée comme illégal et le gouvernement a contourné cette condamnation en augmentant le taux de cotisation pour tous les détachés, ce n’est pas acceptable.
De facto, l’augmentation du taux de cotisation conduit ainsi à faire peser pour tous les détachés directs sur le seul salarié la cotisation retraite, ce qui est inacceptable !
Cette mesure touchera de plein fouet les personnels détachés dans le réseau de la Mission laïque française, dans les établissements partenaires et à Monaco.
Cette augmentation pèsera très fortement sur la rémunération des personnels concernés en constituant 27,7% du traitement indiciaire, or ces personnels sont rémunérés sur la base d’un salaire local. Pour un certifié ou un professeur des écoles au 9e échelon, cela constitue un surcoût de 5 507 € annuels soit environ 460 € par mois.
En l’état, les personnels n’auront pas le choix :
Soit ils subiront une baisse substantielle de leur pouvoir d’achat.
Soit ils devraient renoncer à cotiser à la pension civile. Mais, cette disposition s’ajoute à l’effet dissuasif du bornage des détachements instauré par le MEN en 2019. Même en cotisant 6 ans au maximum dans le système local, ces personnels n’auront de fait pas de droits à pension dans le pays.
Soit ils seront contraints de réintégrer, dans l’urgence cette année. Déjà, nous sommes interrogés sur les modalités de réintégration.
Quant à ceux susceptibles de venir de France, cette mesure risque fort de les décourager.
Ce décret est donc synonyme de précarisation des personnels mais constitue également une menace pour les établissements. Soit,ils pourraient avoir du mal à recruter ou à conserver leurs personnels détachés, soit ils devront prendre en charge le surcoût de cette mesure. La rentrée 2022 risque d’être très compliquée.
La FSU demande une modification du décret et le maintien du taux de cotisation à 11,10% pour les détachés directs dans les établissements français de l’étranger. A partir du moment où il y a un détachement, la part patronale doit être prise en charge en totalité mais pas par le salarié.
La colère des personnels s’exprimera notamment lors d’une grève dans le réseau de la MLF dès le 24 mai à l’appel de la FSU.
Télécharger la déclaration FSU au format pdf :
Notre compte rendu de la réunion
Tous les participant-es à cette réunion ont émis un constat commun : cette décision a été prise sans qu’aucun acteur ne soit consulté en amont. L’étude d’impact n’a pas été menée. Or, si ce décret concerne tous les fonctionnaires détachés dans toutes les institutions à l’étranger qui ont opté pour le maintien de la cotisation pour la pension civile, cette modification aura de lourdes conséquences sur le réseau des établissements français de l’étranger en matière de recrutement. Beaucoup ont insisté sur les conséquences financières qui pèseront sur ces personnels détachés.
Le directeur de l’AEFE a précisé que ses personnels sous contrat ne sont pas concernés. Seuls deux établissements de l’AEFE emploient des détachés directs (Mexico, San Francisco). Il ajoute que, pour l’AEFE, la compensation de l’État pour la part patronale n’est pas à la hauteur puisqu’elle n’a pas été réévaluée depuis 10 ans. Il manque donc 50 millions d’euros.
La DGRH du MENJS explique qu’ils sont sollicités sur cette question par de nombreux personnels mais qu’à ce jour, un seul agent a renoncé à son expatriation. Elle rappelle qu’il y a 2800 agent-es potentiellement concernés par cette mesure.
Les parlementaires sont intervenus en fonction de leurs sensibilités politiques. Certains demandant le report, d’autres la suppression pure et simple. Tous ont insisté sur les impacts d’une telle mesure.
L’un d’entre eux a estimé qu’il s’agissait d’une attaque contre l’action extérieure de la France et la prise en charge par l’Etat de la part patronale des cotisations des personnels détachés directs représente une subvention cachée pour les établissements privés de droit étranger.
Pour le directeur général de la MLF, cette mesure contribue à déstabiliser la rentrée scolaire 2022. Sur 2800 agent-es, 500 exercent dans des établissements MLF. Les remontées des établissements témoignent d’une grande inquiétude des personnels qui se disent prêts à demander leur réintégration. Il a annoncé le mouvement de grève du 24 mai à l’appel de la FSU.
Le représentant de l’AFLEC a rappelé le rôle essentiel joué par les titulaires détachés directs dans le réseau qui ne pourrait fonctionner uniquement avec des personnels de droit local.
Le Directeur du DCERR et le Directeur de l’AEFE ont confirmé que les personnels dont l’arrêté de détachement ou de renouvellement a été émis avant le 1er mai, ne sont pas concernés par cette augmentation pendant toute la durée de leur détachement.
Pour conclure, le Directeur de la DCERR souhaite obtenir le report de la mise en application de ce décret. Il portera cette demande auprès des cabinets des ministères concernés dès qu’ils seront constitués.
La FSU poursuit ses interventions et appelle l’ensemble des collègues à la mobilisation !
Lire nos précédents articles sur le sujet :
– Détachés directs : explosion scandaleuse du taux de cotisation à la pension civile !
– Explosion de la cotisation retraite des détachés directs : la FSU appelle à la grève le 24 mai dans le réseau MLF !